SEM Faure Gnassingbé parle des recettes qui ont permis la performance historique du Togo dans le classement Doing Business 2020 :
« Monsieur le Premier Ministre,
Madame la Présidente de l’Assemblée Nationale,
Mesdames, Messieurs les Présidents des Institutions de la République,
Mesdames, Messieurs les membres du gouvernement,
Monsieur le Vice-Président de la Société Financière Internationale pour le Moyen-Orient et l’Afrique,,
Madame la Représentante-Résidente de la Banque Mondiale,
Messieurs les membres du corps diplomatique,
Honorables députés à l’Assemblée Nationale,
J’étais pressé de noter la présence de nos amis du secteur privé, on n’a pas toujours été amis, mais je crois qu’aujourd’hui, nous célébrons une victoire commune.
Je salue également les vénérables autorités traditionnelles et militaires, les amis de la presse et la société civile.
Aujourd’hui nous laissons nos querelles et nos disputes de côté pour célébrer le Togo. Parce que ceux qui connaissent le Togo nous le reprochent souvent, on aime plutôt la victoire modeste. On n’aime pas trop célébrer ce que nous avons réussi. Et n’eut-été l’insistance des uns et des autres, je ne pense pas que je serais devant vous, parce que je pense déjà à l’année prochaine.
Il y a deux ans, nous étions 156ème et quand le rapport est sorti, le conseil des ministres a été chaud parce que je n’étais pas du tout content. Nous avions régressé, nous étions avant-derniers dans l’espace Uemoa. Mais cela a eu le don de nous réveiller et de nous dire que ce n’est pas possible. Parce que nous avions connu une progression et nous redescendions.
Que fallait-il faire pour pouvoir avancer ? Et puis rappelez-vous toutes les tracasseries que nos populations vivaient. Les titres fonciers, des gens qui avaient même fini par oublier qu’ils avaient déposé des dossiers, l’électricité où des gens se plaignaient à propos du raccordement.
Pour une fois, nous reconnaissions que le classement reflétait une certaine réalité. Il faut reconnaître que c’était difficile pour les usagers, et pour nos compatriotes. Nous avons pris l’initiative de nous rapprocher davantage du Groupe de la Banque Mondiale que je salue pour l’aide qu’ils nous apportent notamment le bureau local et nos amis de la SFI, pour essayer de mieux comprendre ce qu’il fallait faire pour améliorer la situation.
Et naturellement nous avons mis en place par décret la Cellule Climat des Affaires que dirige admirablement Madame la ministre Johnson et puis nous sommes allés à l’assaut de nos difficultés. Nous ne sommes pas allés seuls, nous avons commencé à rencontrer nos amis du secteur privé. Ils avaient aussi beaucoup de problèmes : il y ça qui ne va pas, ça qui ne va pas. Mais comment ils font pour gagner de l’argent si tout ça ne marche pas dans le pays ? Nous avons nos amis les notaires qui, aussi, à chaque fois qu’on pensait avoir fait des progrès, quand le résultat sortait, on se rendait compte que les réponses n’étaient pas conformes à ce que nous avions espéré. Je crois que le Président de la Chambre des Notaires qui est ici se souvient des va et vient qu’il y a eu, de même que les difficultés de compréhension que nous avons eues.
Mais aujourd’hui nous sommes tous fiers des pas qui ont été réalisés par les uns et les autres et surtout de l’impact que cela a. Au-delà de tout, nous devons d’abord être fiers de voir que le nombre de création d’entreprises est très élevé dans notre pays. Puisque nous sommes souvent nombreux à nous plaindre du poids et de l’importance du secteur informel alors que nous avions la solution à notre portée.
Si les gens allaient vers l’informel, c’est qu’ils trouvaient que c’était compliqué, difficile et cher de créer des entreprises. Nous avons fait les sacrifices qu’il fallait, c’est vrai qu’il y a eu un manque à gagner mais l’impact pour un jeune togolais qui se découvre à la tête d’une Sarl en vaut la peine. C’est important pour lui, pour sa fierté, pour son ambition et finalement pour le pays.
Au-delà de cela, nous avons adopté un Plan National de Développement, et j’en parlais d’ailleurs avec notre Chief PND Officer, Monsieur Carlos Lopes, dont je salue la présence ici, quand nous avons fait ce beau plan, il fallait chiffrer le coût. Comment allons-nous faire pour développer les différents axes ? Le coût était extrêmement élevé et nous avons regardé les possibilités que nous avions. Comment allons-nous faire pour financer ? Nous nous sommes rendus compte que le taux d’endettement était tel qu’il n’était pas possible que l’Etat puisse faire cet effort.
Alors où allons-nous trouver cet argent puisque de toute façon, il faut financer ce plan, il faut que nous puissions nous développer ? L’aide publique au développement comme l’a dit Monsieur le Vice-Président de la SFI, se fait de plus en plus rare et le niveau baisse. La seule possibilité que nous avions était d’aller vers le secteur privé, notamment national d’abord et ensuite à l’étranger.
Mais on ne va pas voir le secteur privé les mains vides. Parce qu’eux, ils comptent chaque franc. Chaque sou dépensé doit rapporter de l’argent. Quand vous allez les voir, ils ont des sous mais ils regardent si votre pays est attractif ou pas. Donc il y avait une impérieuse nécessité de réformer nos habitudes, nos institutions, nos procédures, en supprimer certaines pour rendre le pays beaucoup plus attractif. Nous n’avions plus le choix, il fallait absolument que nous puissions faire cet effort là.
Comme on dit chez nous : « Si la pâte que te sert ta maman ne te suffit pas, la pâte de ta marâtre ne te suffira pas non plus ».
Donc si le secteur privé togolais lui-même ne trouvait pas que nous étions assez attractifs, comment voulez-vous que quelqu’un qui vient de l’étranger juge que le Togo est une terre d’investissement ? Il fallait nécessairement prendre attache avec ceux qui sont dans notre pays pour leur demander : « vous qui êtes des hommes d’affaires que voulez-vous pour rendre le pays attractif ? ». Naturellement, si on les écoutait, on changerait tout. Mais nous aussi nous voulons un peu d’argent, le Ministre des Finances est comptable du budget. Et donc nous avons noué un dialogue avec l’appui de nos partenaires, et c’est comme ça que nous avons appris d’abord à mieux nous connaître mais surtout à nous faire confiance.
Les désaccords n’ont pas disparu et ils ne sont pas totalement satisfaits, nous non plus, mais au moins il y a cette confiance et cette assurance que dès que ce sera possible, pour l’un ou pour l’autre, nous allons pouvoir avancer. C’est comme cela que nous avons démarré cette aventure, avec un certain succès, c’est vrai, puisque nous sommes allés vite même si certains ont dû vivre des moments désagréables parce qu’ils se sont vus convoqués à la Présidence de la République, mais à la fin de l’entretien, je pense que nous nous comprenions.
Après cela nous avons d’autres groupes. C’est vrai qu’on parle du secteur privé mais je dois aussi saluer les architectes, les géomètres et les jeunes de l’administration. C’est vrai qu’il est de bon ton de se plaindre de son administration mais je crois que dans notre administration, il y a des talents, des compétences, des gens qui travaillent jour et nuit, pour réaliser telle réforme, prendre tel arrêté, pallier à tel ou tel, le ministre a voyagé… Ce sont de petites choses, des petits ruisseaux comme ça mais finalement, ça donne le résultat que nous connaissons.
Mais nous devons savoir que nous sommes en compétition avec les autres. Ce que nous avons réussi aujourd’hui, si nous ne maintenons pas le cap, demain nous pouvons reculer. Et si nous reculons, je crois que l’impact sera encore plus négatif. Les mauvaises langues nous diront que c’est par hasard, mais non. Cela fait 2 ans que nous avons entamé cela, il faut que l’année prochaine, nous puissions maintenir le cap, même si les périodes de campagne électorale ne sont pas propices aux réformes. Il faut que dès maintenant, c’est l’instruction que j’ai donné à l’administration, nous prenions de l’avance sur les réformes que nous devons réaliser pour l’année prochaine. Comme je l’ai dit tout à l’heure, je ne veux pas avoir honte l’année prochaine. Il faut que l’année prochaine, le rythme des réformes puisse s’accélérer. C’est vrai que quand on dit élection présidentielle en Afrique, il y a toujours une période d’incertitudes, les gens sont attentistes, mais nous nos élections, je l’espère, auront lieu tôt pour que nous puissions nous consacrer à ce que nous voulons de plus. La croissance inclusive, le développement et la prospérité pour notre pays. C’est possible !
Nous sommes allés en Asie il y a quelques mois, nous avons rencontré des investisseurs qui vont venir dans notre pays et je peux confirmer ce que dit Monsieur Pimenta. Nous avons toutes nos chances d’attirer des investisseurs dans notre pays. Et comme il le disait, nous n’avons pas le choix. Ce n’est pas l’Etat qui crée des emplois, c’est le secteur privé par ses investissements qui génère des emplois. Nous nos capacités sont limitées. Si on a besoin mais que l’on ne peut payer que 1000 instituteurs, on ne peut pas en recruter 5000 parce que nous ne pourrons pas les payer. Nos capacités sont limitées. Tout ce que nous pouvons faire, c’est créer cet environnement pour que le secteur privé puisse venir investir dans notre pays.
Nous avons la chance d’avoir déjà des fondamentaux, la paix et la sécurité, c’est le plus important. Nous avons un cadre des finances assaini, un cadre macroéconomique bien, maintenant il faut que les investissements puissent venir. J’ai reçu la lettre d’un responsable d’une association des consommateurs qui disait « Monsieur le président vous avez un mandat social mais vous avez augmenté tel prix, vous avez augmenté tel prix ».
Mais un mandat social, si vous le gérez mal vous ne pouvez pas faire du social. Parce qu’aujourd’hui le poste le plus élevé dans notre budget, c’est le remboursement de la dette. Vous avez une dette, vous devez rembourser.
J’aurai préféré que ce soit l’éducation, l’agriculture ou la santé. Mais la réalité à laquelle je suis confronté, c’est que je veux rembourser la dette. Si vous gérez mal, si il y a du laxisme dans la gestion, vous ne pourrez pas financer le social.
Vous savez que le taux de pauvreté est élevé sur le continent et dans notre pays, il faut nécessairement le réduire, cela passe par une bonne gestion, cela passe par ce cadre que nous sommes en train de créer. Ces réformes que nous devons faire, c’est toujours douloureux, les réformes ont toujours un prix. Il y a toujours quelqu’un quelque part qui est lésé quand on fait des réformes. Tout à l’heure on a chiffré le manque à gagner de plusieurs milliards. Mais in fine, c’est le pays qui gagne, c’est le Togo entier qui gagne, c’est la richesse qui est créée de façon beaucoup plus importante.
Alors je vous le dis, ne vous lassez pas de faire des réformes, travaillons pour que le Togo garde cette place de meilleur réformateur en Afrique. La marge de progression est encore grande et je sais que si nous maintenons cet esprit, cette coalition entre l’administration et le secteur privé, entre les autres corps de métiers, les architectes, les notaires, les avocats… tous ensembles nous allons réussir.
De toute façon nous n’avons pas le choix, nous devons le faire, faisons-le et faisons le bien.
Je vous remercie de votre attention. »
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